Dans l’entreprise elle-même : Léon Harmel, un pionnier de l’action sociale en entreprise visant l’autonomie des ouvriers dans ce domaine. (1829-1915)
Le père de Léon Harmel, Jacques-Joseph Harmel, a déjà créé une filature du val du Bois, une caisse des économies ( 1842), une caisse de secours ( 1846), une société musicale (1848). L’atmosphère est donc familiale, mais non-paternaliste, ce qui fait la spécificité de la maison Harmel. C’est une » corporation chrétienne, une association religieuse etéconomique avec conseil d’usine et oeuvres sociales, où collaborent ouvriers et patrons.
» Le bien de l’ouvrier, avec l’ouvrier, par l’ouvrier, jamais sans lui et à plus forte raison, jamais malgré lui. » Léon Harmel entrevoit l’erreur du paternalisme et devance bien des catholiques chez lesquels la confusion du genre familial avec le genre utopiste empêche ou retarde une doctrine sociale adaptée au monde professionnel. Très en avance, Léon Harmel a souvent contre lui le monde patronal y compris catholique. Chez lui, tout est basé sur la solidarité, la réciprocité et la confiance. Cependant, il n’échappe pas, sur d’autres points, à son époque : en témoigne la demeure familiale, » trônant » à l’entrée de l’usine, évoquant le rassemblement autour du patron et de la foi.
Une grande créativité dont on peut inspirer encore à l’intérieur de l’entreprise en général !
-Des initiatives patronales.
A : La semaine anglaise ( 1878 ), par un patron de la Loire, Déchelette ( textile), de Roanne. Cela gagnera Lyon ( soierie). Il s’agit de promouvoir…le week-end et le repos du dimanche !
B : la promotion des employés du Louvre ( 1890-1902), par Frédéric Honoré.
C : Conseil de la Grande Imprimerie, à Blois 1896.
-Les coopératives sillonistes ( 1907, 1908)
Cette initiative a l’intérêt de montrer qu’une affaire peut être viable avec des salaires décents.
-En période de guerre (14-18), l’usine militaire des Gravandes, qui faisait de chargements d’obus, institua des délégués et une prime de production. Idées reprises hors contexte belliqueux !
-Entre les deux guerres, les initiatives reprirent :
A : les établissements Pernod à Dijon, biscuiterie qui fut fermée en 1980, créèrent en 1919 un conseil paritaire.
B : Les Conservateurs, à Nantes (1936), sous l’inspiration d’E. Decré, mettent en place un service social d’inspiration chrétienne.
C : Dominique Soulé ( patron à 15 ans), crée une usine à Bagnère-de-bigorre,( 1862) entreprise familiale qui oeuvre dans le domaine ferroviaire, puis connaître dans les années 1990 une mutation vers le secteur électrique. Dominique Soulé aura initié des prêts, une aide au personnel, des allocations familiales, une caisse de secours ( maladie, maternité, décès), l’arbre de Noël, la prime d’ancienneté. Surtout, son amour des ouvriers fera que ceux-ci l’honoreront pendant les événements de 36-37 en offrant un buste de leur patron, à leurs frais, le 5 juin 1937.
On voit donc se déssiner deux mouvements encore fortement imbriqués : les initiatives patronales qui sont destinées au bien social de l’entreprise et des ouvriers, mais n’impliquent pas ces derniers dans l’action ( ils sont destinataires, ou parfois associés), et des initiatives patronales qui tendent à impliquer les ouvriers dans le processus selon la pensée de Léon Harmel. On ne trouve pas, dans le contexte de l’industrialisation, d’initiatives ouvrières à destination des ouvriers, avant la naissance des syndicats, autorisés seulement à partir de la loi de 1884 ( Waldeck-Rousseau).