Noblesse du travail
Une réalité importante pour la Doctrine sociale de l’Eglise que le travail ! Cette activité était prévue dans le plan divin avant la chute originelle ; la création avait été en quelque sorte livrée à l’homme avec toute ses potentialités inexplorées et l’homme recevait la mission de la découvrir, de la dominer, d’en tirer pour sa joie le maximum de possibilités. Sans le péché originel, cette activité pourtant n’aurait été ni nécessaire pour subsister, ni fatigante, en somme un loisir de souverain, une détente de seigneur.
La malice du diable, l’orgueil d’Eve, puis sa convoitise et la complicité d’Adam ont changé les données. Le travail est devenu besogne, c’est-à-dire besoin et labeur, c’est-à-dire fatigue : » désormais, pour subsister, tu travailleras à la sueur de ton front ».
Mais le travail n’a pas perdu toute sa noblesse ! D’abord parce que faire subsister une famille est méritoire, en second lieu parce que le travail humanise la nature devenue hostile, enfin parce que l’homme développe dans cette activité toutes sortes de talents d’inventeur, de créateur, de réalisateur. Il est d’ailleurs significatif que le Christ ait voulu après sa majorité juive atteinte à l’âge de douze ans, passer dix-huit ans de plus à Nazareth en compagnie de Marie et Joseph pour y exercer le métier de menuisier-charpentier.
Naissance de la Doctrine Sociale de l’Eglise
Il est significatif également que l’Eglise ait choisi le très grand saint qu’est Joseph pour en faire le patron des travailleurs. Toute la Bible, ancien et nouveau testament, regorge d’exemples d’hommes et de femmes attachés à leur travail, le faisant avec amour et, pour cette raison, toujours considérés avec sympathie et admiration par les auteurs sacrés.
Pour ce qui concerne la doctrine sociale de l’Eglise, elle est née au XIXe siècle, précisément à l’époque où le sort des travailleurs manuels dans la grande industrie naissante ne cessait d’empirer. Si l’industrialisation profitait à certains, » enrichissez-vous », disait le ministre Guizot, ce n’était pas le cas des ouvriers sans qualification, dont la misère grandissait au fil des années. Léon XIII, dans l’encyclique Rerum Novarum, prit vigoureusement la défense des nouveaux prolétaires, fit un large diagnostique de la question sociale, condamna les fausses solutions et ouvrit le champ des réformes. Mais il se pencha plus sur le sort des travailleurs qu’il n’élabora une théologie du travail.
Une encyclique entière sur le thème du travail : Laborem Exercens
Quarante ans plus tard, Pie XI reprenait les mêmes thèmes, développait, enrichissait la pensée de l’Eglise et l’actualisait. Mais il devait revenir au Pape Jean-Paul II de consacrer une encyclique entière au travail humain, en cernant cette réalité avec l’appui de son expérience personnelle et en actualisant de façon très moderne la vision de l’Eglise sur le travail et les travailleurs. Il s’agit bien-sûr de l’encyclique Laborem Exercenspubliée en 1981. Nous l’avons déjà abordée dans notre rubrique les apports spécifiques de Jean-Paul II, cependant nous allons dans la suite de ce parcours sur le travail, regarder de plus près les éléments pour une spiritualité du travail qui font la dernière partie de l’encyclique. p. Y. Bonnet.
Père Y. Bonnet.