Le projet personnel : une carrière professionnelle se prépare.

Quelques idées toutes faites à reconsider.
La première partie de la vie professionnelle a une importance capitale pour toute la suite de son déroulement. Beaucoup de personnes dans la force de l’âge paient aujourd’hui très cher un début de carrière conduit sans réflexion, ni idée directrice.

L’important, pendant cette période, n’est pas de rentrer dans une institution pour la vie, ni d’être tout de suite dans un poste stable, ni de gagner beaucoup d’argent, ni de parvenir rapidement à l’exercice d’une responsabilité hiérarchique. Nous entendons déjà d’ici les réactions, car ces idées toutes faites sont omniprésentes…et pourtant…

L’essentiel pendant cette première période, dont le terme se situe entre 35 et 40 ans, est de se construire pour longtemps. Traduisons cela par un certain nombre de verbes : investir, explorer, évoluer, développer, rebondir et bien sûr apprendre, toujours apprendre.

Investir.

Investir, cela veut dire qu’une vie professionnelle épanouie implique que l’on ait accepté de payer avant de recevoir. Cette période d’investissement est souvent focalisée sur la formation initiale, mais de façon unilatérale, sans diversification, et en vue seulement du dîplome : du coup, l’investissement dans la formation initiale n’est pas suffisant, car on sait bien aujourd’hui que même le plus prestigieux des diplômes acquis, mettons vers 25-27 ans, ne constitue plus une garantie pour l’avenir malgré son importance.

Alors, où investir? Dans la connaissance de soi, dans la connaissance des métiers, dans la connaissance des hommes, des marchés, des entreprises et des milieux de travail. Il faut profiter du fait qu’il est plus facile de prendre des risques quand on est jeune, que l’on a en général des charges familiales modérées, et que  » bouffer un peu de vache enragée » n’a jamais fait de mal à personne. Cet investissement se fait donc sur le terrain, au fur et à mesure de l’expérience et de sa diversification.

Se constituer un bilan de ce que l’on est et de ce que l’on sait faire.

Investir intelligemment, et donc explorer. Rechercher d’abord non pas les créneaux  » porteurs » ( ils risquent d’être déjà très encombrés), mais ceux où l’on pense pouvoir apporter une passion, une envie de progresser, des qualités, et assez rapidement quelques compétences acquises au cours des investissements précédents.

Dans de tels créneaux, on commence souvent à travailler sans sécurité, et au minimum vital. On peut au début se permettre de changer plusieurs fois de jobs, si on se sent plusieurs possibilités  » d’accrocher ». Ce temps d’exploration ne doit pas devenir instabilité, ni goût du risque ( il en faut bien  un peu), mais occasion d’expérimentation.

Il est alors important, dans cette période d’exploration et d’expérimentation, d’évaluer à chaque essai ses performances. Car il s’agit de se constituer peu à peu un bilan de ce que l’on est et de ce que l’on sait faire.

Succès et échecs.

Savoir être et savoir faire sont les deux clés de la vie professionnelle réussie. Il faut s’évaluer et se faire évaluer sans complaisance, mais également sans excessive sévérité : la vie est toujours faite de succès et d’échecs. Ce sont ces succès et échecs qu’il faut analyser, pour découvrir peu à peu ses dons et ses limites, ses acquis et ses lacunes, ses goûts ( dûment validés) et ses répulsions ( exemptes de préjugés).

Il est important de mesurer ses ambitions avec l’avis d’autrui, d’en peser le réalisme, et de s’interroger sur la volonté que l’on a d’en prendre les moyens. Et enfin, comprendre ce qui stimule la progression et ce qui la freine. Quel échec m’a montré quelle limite d’investissement personnel? L’essai suivant tient-t-il compte de cette découverte?

De telles explorations et évaluations prennent du temps, mais ce n’est pas du temps perdu : c’est du temps investi, et un ecellent placement. Cette analyse des succès et des échecs permet de développer ultérieurement ses points forts et de rebondir sur ses échecs, en faisant en sorte que les points faibles ne deviennent pas des handicaps.

Corriger ses points faibles.

Entendons-nous bien : autant il est facile de développer ses points forts, autant il n’est pas toujours aisé de corriger ses points faibles. Il est bien utile et réaliste de repérer ceux qui sont quasi impossible à corriger : tel aura toujours du mal à s’exprimer dans un anglais fluide et plus encore à le comprendre à la vitesse normale d’une conversation. Tel ne rédigera jamais comme Balzac ou Flaubert. A l’impossible nul n’est tenu. Mais il faut alors éviter de se mettre en situation d’être handicapé par ses points faibles. On peut alors corriger ses points faibles en évoluant de façon souple, et en les contrebalançant par des points forts. Savoir changer de stratégie pour atteindre son but, sans s’enfermer dans une seule manière de faire! C’est une manière de ne pas s’endormir sur ses succès, mais d’en profiter pour continuer à progresser sur ses points forts en ayant neutralisé les points faibles…

Les trois étapes de la préparation d’une carrière professionnelle.

Donc , la formation initiale donne, du moins peut-on l’espérer, des outils de raisonnement, des bases de culture, et des connaissances d’ordre scolaire. C’est déjà une base qu’il ne faut pas négliger.
Si grâce aux stages, à l’alternance, à la formation professionnelle, on a pu acquérir des compétences, c’est une deuxième étape indispensable en vue de la formation professionnelle. D’où l’importance dans nos écoles de travailler en lien avec le monde professionnel, afin d’habituer les jeunes à un réalisme de la vie de travail dès l’adolescence.
Mais il faut informer assez tôt le jeune que c’est la vie professionnelle et la formation continue qui vont permettre à chacun de se construire, dans une troisième étape s’appuyant sur les deux précédentes. La construction d’une carrière professionnelle se fera à la condition de s’appuyer sur un bilan régulier de ses expériences ; sur le fait d’être toujours prêt à apprendre, et sur une bonne sélection des apprentissages.

Les modes sont trompeuses, la paresse coûte cher, la passivité est suicidaire. Passion, énergie, opiniâtreté, adaptibilité, humilité, sont les clefs d’une vie professionnelle réussie ; elles sont elles-mêmes le produit d’une véritable éducation de la personne. C’est l’éducation qui permet de bien gérer la première période de la vie professionnelle.

P. Y. Bonnet

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