La question ne cesse de prendre une importance cruciale pour l’avenir de la France. Quand on fréquente les responsables de PME, on ne peut manquer d’être frappé par la tonalité alarmiste de leurs propos, quand ils évoquent leurs difficultés à recruter une main d’œuvre adaptable à leur métier.
Que les recrues ne soient pas immédiatement adaptées n’est pas pour les inquiéter, cela a toujours été le cas pour la grande majorité des embauchés, même issus d’une solide formation professionnelle. Non, le constat est qu’ils n’ ont pas été formés à réfléchir ni à raisonner et qu’ils n’ont pas les bases de la langue française pour pouvoir poser les questions et comprendre les réponses !
A cela vous pouvez ajouter que l’usage prématuré de la calculette ne les aide pas à repérer les ordres de grandeur et qu’on ne leur a pas donné l’habitude de construire eux-mêmes des graphiques simples pour représenter visuellement les données de l’énoncé d’un problème.
Avant de mettre en place une énième réforme du collège, aussi inepte qu’inutile, il aurait fallu redonner à l’enseignement primaire l’éminente qualité qui a été la sienne pendant des décennies. N’oublions jamais que nous avons réalisé le bond des trente » glorieuses » avec une majorité de salariés, cadres autodidactes compris, qui avaient débuté leur carrière avec le seul solide niveau du certificat d’études primaires. Quand j’ai quitté en 1978 l’industrie pour diriger une Ecole d’ingénieurs chimistes, j’ ai constaté déjà un écart de qualité important entre le travail scientifique des élèves, d’excellente valeur, et la rédaction du rapport, parfois calamiteuse! Il a fallu donner quelques cours de français, après avoir expliqué aux jeunes qu’un rapport bien ficelé peut promouvoir un travail médiocre quelconque mais bien présenté!
J’ai quitté la direction de l’Ecole en 1989 pour créer ma propre entreprise, mais gardé suffisamment de contacts tant avec le milieu industriel qu’avec le monde de l’enseignement, pour savoir que la situation a empiré.
Les gourous du pédagogisme ont continué à perpétrer impunément un génocide qui a brisé l’ascenseur social: c’est un drame pour les familles modestes et une perte sèche pour notre pays. En quelque sorte, une action criminelle, dont aucun Ministre de l’Education Nationale ( cette machine à broyer, pour reprendre le titre d’un livre récent d’une professeur de Lettres ) ne peut enrayer l’action destructrice. Dieu merci, n’en déplaise aux incultes de tout niveau, la culture française résiste miraculeusement à toutes les tentatives de destruction, et ses plus farouches défenseurs n’ont pas forcément un patronyme franchouillard, ce qui est le bon signe de sa valeur universelle! N’est pas Fille Aînée de l’Eglise qui le veut, et tant mieux si des agnostiques venus d’autres continents continuent à défendre sa culture avec bec et ongles. Ils méritent bien que nous célébrions de Saintes Messes pour demander à notre divin Maître de pourvoir à leur salut éternel et, pour ma part, je m’acquitte avec joie de ce devoir de charité fraternelle.
Pour conclure, je persiste à penser qu’il ne faut pas tenter de réformer l’Education Nationale. On ne réforme pas une machine à broyer pour en faire une machine à former et à cultiver, on la met à la casse, sans regret et sans Requiem!
Père Yannik Bonnet